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La reserve fédérale rassure les marchés Dominique Marchese, Head of Equities & Fund Manager, 2021-07-01

  • La Fed convainc les investisseurs
  • Les valeurs technologiques profitent de l’aplatissement de la courbe des taux en dollar
  • Conclusion

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La Fed convainc les investisseurs

La dernière réunion du comité de politique monétaire de la banque centrale américaine du 16 juin a levé un coin du voile sur ses intentions. Face à de fortes pressions inflationnistes (prix à la consommation en hausse annuelle de 5% en mai, contre 4,2% en avril, prix à la production en progression de 6,6%) et à une reprise dynamique de l’activité favorisée par la sortie de la crise sanitaire et les programmes de relance (taux de chômage ramené à 5,8% contre 14,8% en avril 2020), la majorité des membres du comité prévoit deux hausses des taux directeurs en 2023. Le consensus du marché pariait plutôt sur 2024. Comme attendu, la Fed a évoqué la question du tapering en insistant sur le fait que toute diminution du rythme des achats de titres de dette publique et de créances immobilières (120 milliards de dollars par mois actuellement) sera conditionnée à des progrès substantiels en matière d’inflation (c’est-à-dire une hausse annuelle des prix durablement supérieure à l’objectif moyen de 2%) et d’emploi (amélioration du taux de participation de la population). Les autorités monétaires ont insisté une nouvelle fois sur le caractère transitoire de l’inflation observée aujourd’hui, même si les dernières statistiques publiées dépassent de loin les attentes. Selon leurs prévisions, l’indice des prix à la consommation hors éléments volatils  (énergie, produits alimentaires) ne devrait progresser que de 2,1% en 2022. La Fed a profité de sa dernière réunion pour communiquer de nouvelles estimations de croissance réelle (en volume) du PIB américain : +7% en 2021 (contre +6,5% précédemment) et +3,3% en 2022, des estimations qui font néanmoins face à de grandes incertitudes liées à la politique budgétaire et fiscale de la Maison-Blanche qui sera effectivement déployée dans les prochains trimestres (âpres négociations toujours en cours au Congrès au sujet de deux programmes axés respectivement sur les infrastructures et les dépenses sociales, mais considérés par Joe Biden comme faisant partie du même plan de relance).

L’heure est donc plutôt à l’optimisme. Dans un monde gorgé de liquidités bon marché, les prévisions de relèvement des taux directeurs en 2023 sont trop éloignées dans le temps pour avoir une influence significative sur les marchés financiers. La courbe des taux d’intérêt en dollar a d’ailleurs subi un léger aplatissement : alors que le taux souverain à deux ans progressait d’une dizaine de points de base pour atteindre 0,25%, le rendement de l’obligation du Trésor à  dix ans se contractait légèrement pour revenir à 1,50% (contre 1,65% avant le dernier comité monétaire), un niveau qui reste dérisoire et qui démontre la capacité de la Réserve fédérale à contrôler l’entièreté de la courbe des taux, plus particulièrement la partie longue (le 30 ans Treasury a vu son rendement baissé de 40 points de base depuis février dernier pour atteindre 2% !). Ce phénomène qualifié en anglais de « bear flattening » témoigne de la forte crédibilité dont jouit la Fed. Dans leur très grande majorité, les investisseurs adhèrent au scénario central proposé : un rebond économique fort accompagné d’un pic d’inflation transitoire. Le thème du tapering évoqué par les membres du comité n’inquiète nullement les marchés convaincus que la banque centrale américaine agira avec prudence afin d’éviter tout mouvement de panique sur les marchés obligataires. Preuve de la confiance inébranlable des investisseurs, le contrat financier swap d’inflation cinq ans dans cinq ans en dollar a reflué autour de 2,35% , son niveau du début d’année, soit une contraction de 0,2% environ.

S’agissant de l’Union européenne, nous insistons sur la ratification par les États membres du plan de relance Next generation EU d’un montant total de 750 milliards d’euros (5,6% du PIB de l’Union), et la levée des premiers fonds par la Commission. 20 milliards d’euros d’obligations à dix ans ont ainsi été émis le 15 juin dernier au taux de 0,086% que nous comparons à celui des obligations souveraines de l’Italie, autour de 0,8%, un des principaux bénéficiaires des fonds européens. Nous rappelons que le volet « ressources propres » du plan de relance permet à la Commission d’émettre des obligations, une première pour l’Union. De nouvelles tranches seront émises dans les prochains mois. 100 milliards d’euros devraient ainsi être levés en 2021, le reste sur la période 2022-2023. Selon l’agence de notation S&P, ce programme devrait permettre d’augmenter le PIB de l’UE de 1,5% à 4,1% d’ici à 2026, selon les hypothèses retenues (effets multiplicateurs de la dépense publique, vitesse de déploiement des fonds…). L’effort principal portera sur le renforcement de la croissance économique potentielle des pays les plus fragiles de l’Union dont les programmes de relance ont fait l’objet d’une approbation par la Commission. Les perspectives économiques européennes sont donc plutôt favorables après l’accumulation de quelques mois de retard par rapport au cycle d’activité du reste du monde, puisque viennent s’ajouter la sortie de la crise sanitaire et la réouverture des économies qui permettent un fort rebond de la consommation et des services au deuxième trimestre. 

 

Les valeurs technologiques profitent de l’aplatissement de la courbe des taux en dollar

Depuis le milieu du mois de mai, à la faveur d’une pause dans la hausse des taux d’intérêt à long terme, les actions de croissance en général et les valeurs technologiques en particulier ont recouvré les faveurs des investisseurs. Le phénomène s’est d’ailleurs amplifié après le dernier comité de politique monétaire de la Réserve fédérale. Ainsi, depuis la mi-mai, l’indice mondial MSCI des valeurs de croissance a progressé d’environ 9% (en euro) contre à peine 1% enregistré par l’indice MSCI value (sociétés financières, énergie, matières premières, chimie, biens d’équipement, secteur automobile…). La baisse des taux longs jointe à une atténuation des craintes liées à l’inflation est évidemment favorable aux sociétés cotées les plus chèrement valorisées et à forte croissance attendue des cash-flows. Après plusieurs mois de consolidation, l’indice Nasdaq des valeurs technologiques américaines a battu de nouveaux records (indice Nasdaq Composite +12% depuis le début de l’année, en dollar), grâce à ses stars habituelles que sont notamment Microsoft, Facebook, Alphabet et Nvidia. L’indice iShares des valeurs du secteur des semi-conducteurs tutoie à  nouveau les sommets, soutenu par un super-cycle alimenté par la pénurie de composants électroniques, les nouvelles percées technologiques (diminution du pas de gravure et poursuite de la loi de Moore), l’accélération de la digitalisation de l’économie, et pour finir la volonté politique d’une plus grande autonomie souveraine dans ce secteur clef (États-Unis, Chine, Europe). La publication des résultats du troisième trimestre (clos à fin mai) du leader mondial des services informatiques Accenture, très supérieurs au consensus et aux attentes de sa direction (croissance organique des ventes de 13,5% ; forte progression du carnet d’ordres), témoigne d’une nette accélération de la demande dans les services technologiques de la part des entreprises désireuses d’hâter leur transformation numérique, en particulier dans les secteurs manufacturiers. Cette publication, qui démontre que le fort redressement de l’activité se déroule autant en Amérique du Nord (progression des ventes de 18% à taux de change constants) qu’en Europe (+14% contre à peine +3% le trimestre précédent), est sans doute de bonne augure pour les leaders européens tels que Capgemini ou Sopra Steria qui ont annoncé récemment des rythmes de recrutement comparables au niveau pré-crise.  

La  banque centrale américaine n’est sans doute pas la seule responsable du comportement boursier quelque peu décevant de la thématique value au bénéfice des secteurs de croissance. Les inquiétudes récentes alimentées par la vitesse de propagation du variant Delta (adoption de mesures de restriction de circulation dans quelques pays plus durement touchés) fragilisent à nouveau les secteurs du tourisme  et du transport tout en confortant les leaders technologiques dans leur rôle de valeurs refuges. 

Conclusion

Le mois dernier, nous estimions probable voire souhaitable une phase de consolidation des marchés d’actions après le remarquable rebond des derniers mois (performance de l’ordre de 15% en Europe depuis le 1er janvier). Nous insistions sur la fragilité des valeurs de croissance à la merci de brusques mouvements de stress liés à l’inflation, aux taux d’intérêt et aux politiques monétaires. Cette correction ne s’est pas matérialisée. Bien au contraire, les investisseurs ont salué la stratégie monétaire de la  Réserve fédérale américaine. Le comportement des actifs financiers valide à présent sans retenue le scénario central d’une reprise économique soutenue sans risque inflationniste. Faut-il dès-lors délaisser à nouveau l’Europe et la value pour favoriser les actifs américains et les valeurs technologiques ? L’indice Nasdaq 100 est valorisé 29 fois les résultats attendus en 2021, ce qui est plutôt généreux. L’indice S&P 500 des valeurs américaines se paye plus de 22 fois les bénéfices estimés en 2021 (environ 20% plus cher que la moyenne des cinq dernières années). Même si nous sommes d’avis que les actions offrent toujours de la valeur à long terme (rendement des free-cash-flows attendus en 2022 de l’indice mondial MSCI proche de sa moyenne à long terme de 5%), nous réitérons notre conseil de prendre quelques profits ou d’acheter éventuellement des couvertures sur les indices boursiers en profitant de la modération de la volatilité des marchés financiers. Le comportement des actions chinoises depuis le début de l’année devrait d’ailleurs servir de signal d’alerte. La Chine, en avance de plusieurs trimestres sur le cycle du reste du monde, a finalement décidé de resserrer sa politique monétaire pour lutter contre les risques de surchauffe de son économie et de ses marchés financiers. Les autorités monétaires de Pékin cherchent notamment à calmer quelque peu les marchés du crédit en ébullition. Le résultat est une correction de l’indice MSCI China de l’ordre de 15% depuis la mi-février, accentuée par le renforcement de la régulation antitrust contre les leaders du e-commerce. 

Alors que nos modèles théoriques de valorisation indiquent que les actions offrent un potentiel limité à court terme, les actions européennes proposent davantage de valeur et seront probablement soutenues par la BCE qui restera plus longtemps plus accommodante que la Réserve fédérale. Les investisseurs feront néanmoins preuve de vigilance à l’égard de l’évolution du variant Delta qui exige une nette accélération des campagnes de vaccination puisque l’objectif d’immunité collective tant désiré n’est manifestement pas atteint. 


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