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2021 : vers un grand millésime boursier ? Dominique Marchese, Head of Equities & Fund Manager, 2020-11-10

  • Le 9 novembre 2020 restera dans les mémoires
  • Le 3ème trimestre et les élections américaines confirment notre analyse d’octobre
  • Conclusion

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Le 9 novembre 2020 restera dans les mémoires

Nous avons attendu que la poussière retombe un peu sur le champ de bataille des élections américaines avant de rédiger notre note mensuelle. Finalement, ce n’est pas tant l’issue de l’élection présidentielle que les résultats préliminaires de phase 3 très encourageants annoncés par Pfizer et son partenaire BioNTech[1] qui constituent le véritable point de basculement des marchés boursiers qui se complaisaient dans un état de torpeur depuis la fin de l’été. Le taux d’efficacité (90% sur un petit nombre de cas étudiés) semble très supérieur à ce que la communauté scientifique espérait pour un vaccin conçu en un temps record au moyen d’une technologie génétique récente (dite de l’ARN messager, comparable à celle adoptée par Moderna). Du jamais vu dans l’histoire de la virologie. Même si de nombreuses questions restent posées au sujet de cette étude de phase 3 qui n’est pas terminée, au sujet notamment de la durée de la protection et de la diminution effective des cas sévères de contamination, au sujet de la sécurité du vaccin et des variations observées entre les catégories de population, … Même si nous ne sommes qu’au début des phases d’homologation par les autorités sanitaires compétentes et encore loin des campagnes de vaccination des populations à grande échelle (il nous faudra sans doute attendre la campagne de la saison automne-hiver 2021-2022), il n’en demeure pas moins que ces résultats viennent opportunément atténuer les inquiétudes relatives à la deuxième vague de la pandémie qui frappe actuellement l’Europe de l’Ouest et la troisième qui se dessine aux États-Unis. En effet, les nouvelles mesures de confinement et de restriction de déplacement annoncent sans doute une légère récession en Europe au 4ème trimestre alors que la croissance économique devrait demeurer positive outre-Atlantique si les mesures de restriction ne sont pas durcies dans les prochaines semaines (le taux de reproduction du virus est encore proche de 1, la situation n’est pas aussi alarmante que dans nos régions). Le violent rebond des indices boursiers du lundi 9 novembre (5 à 7% en Europe, 1% aux États-Unis car les technologiques, grandes gagnantes de la crise, ont subi des prises de profits logiques) confirme, selon nous, certaines conclusions que nous avons osé esquisser le mois dernier.

Pour rappel, après la forte reprise des indices durant le printemps qui accompagnait la perspective d’un déconfinement et d’un recul de la pandémie et saluait sans retenue l’ampleur et la rapidité des réponses monétaire et budgétaire jamais vues dans l’histoire économique, nous avions émis quelques doutes sur les valorisations souvent généreuses de nombreux secteurs de la cote, notamment au sein des valeurs de croissance (cf. notes mensuelles de juin et juillet 2020). Nous espérions une phase de consolidation ; elle est advenue à la fin de l’été avec des corrections de l’ordre de 10%, parfois davantage parmi les grandes valeurs technologiques chèrement valorisées. A la recherche de points d’entrée attrayants, nous avions même fixé un objectif pour l’indice européen STOXX 600 : 320 points en cas de consolidation plus franche du marché. L’indice a finalement perdu environ 10% durant la deuxième quinzaine d’octobre pour atteindre un niveau proche de 340 points, plus très éloigné de notre cible (cf. note mensuelle d’octobre pour la question des valorisations). Il semble bien que ce fut là une belle occasion à ne pas manquer. Il est intéressant de noter que la hausse du lundi 9 novembre a surtout été l’occasion d’une violente rotation sectorielle en faveur des cycliques réputées « value » ; en toute logique, la perspective d’une sortie de crise sanitaire et d’une plus forte croissance économique accompagnée d’une éventuelle tension sur les taux d’intérêt à long terme (cependant elle restera sans doute contenue par l’intervention des banques centrales), doit conduire à une meilleure tenue boursière des secteurs qui ont le plus souffert de la récession de 2020.

Cette remarque a son importance car elle milite, dans le chef de l’investisseur, pour une prise de conscience des risques portés par son portefeuille de trop forte concentration sectorielle sur les grands vainqueurs de la crise : plateformes technologiques, streaming vidéo, jeux électroniques, cloud…plutôt généreusement valorisés. Par ailleurs, l’actif « value » par excellence est l’Europe, de par la structure sectorielle de ses indices (poids du segment technologique autour de 5% contre 25% outre-Atlantique) ; la journée du 9 novembre a ainsi vu un écart de performance de l’ordre de 4 à 5% entre l’Europe et les États-Unis ! Compte tenu du retard accumulé par les indices du Vieux Continent à l’égard des marchés américains, ce retour en grâce des actifs européens n’en est sans doute qu’à ses prémices. Nous rappelons la transformation capitale lancée par l’Union européenne qui autorise un début de mutualisation des dettes souveraines et renforce les mécanismes de solidarité dans le cadre d’un plan de relance de 750 milliards d’euros.

[1] Pfizer et son partenaire BioNTech ont annoncé le 9 novembre une efficacité à 90% de leur candidat vaccin contre le Covid-19, une nouvelle qui a été accueillie avec un immense soulagement par les investisseurs.

Le 3ème trimestre et les élections américaines confirment notre analyse d’octobre

Pour commencer, il nous faut dire quelques mots sur les résultats des entreprises du 3ème trimestre qui fut celui du déconfinement. En toute généralité, les publications ont reflété un dynamisme économique supérieur aux attentes des économistes qui ont relevé leurs prévisions pour l’ensemble de l’année 2020. De nombreux secteurs ont réellement profité d’une reprise de l’activité en forme de « V », tels que le luxe, l’industrie automobile, les semi-conducteurs, la distribution, les produits de consommation, ou encore les matériaux de construction. Signe d’une grande capacité d’adaptation des entreprises, surtout celles les plus en avance dans leur transformation digitale, les résultats et les cash-flows furent dans l’ensemble très satisfaisants compte tenu des circonstances. Le 3ème trimestre a donné un message que les investisseurs ne pouvaient ignorer : le scénario d’une reprise en « V » pour ces secteurs, c’est-à-dire à la fois très rapide et d’une ampleur permettant de recouvrer les niveaux d’activité de 2019, est loin d’être inenvisageable lorsque l’économie n’est plus entravée par le confinement. Ce fut incontestablement l’information la plus positive du mois d’octobre (saison des publications des résultats des entreprises) qui a conforté notre opinion « achat sur faiblesse » expliquée dans les détails dans notre note du mois d’octobre. Certes, les secteurs les plus impactés par la crise - transport aérien, tourisme, services de proximité - seront logiquement les derniers à regagner leurs niveaux d’activité de 2019, mais il ne s’agit que de 10 à 15% du PIB des pays développés ; ce bémol est largement intégré dans les stratégies d’investissement des professionnels. 

Ensuite, les élections américaines sont venues ajouter une couche supplémentaire à l’optimisme recouvré des investisseurs. Même si les résultats sénatoriaux ne sont pas complets (la Géorgie organise un second tour le 5 janvier prochain pour les deux sièges à pourvoir et deux autres résultats ne sont pas encore connus), les démocrates ont perdu leur pari d’une large victoire qui aurait signifié la très probable mise en pratique des mesures les plus progressistes du programme de Joe Biden. Or, sans contrôle fort du Sénat (51 sièges sur 100 sont nécessaires pour atteindre la majorité, les démocrates n’en ont gagné que 48), le nouveau président aura le plus grand mal à mener à bien les projets législatifs les plus hostiles à Wall Street : la hausse du salaire minimum fédéral, la hausse des impôts des sociétés et des ménages les plus aisés, le relèvement des taxes sur les plus-values, l’intensification de la régulation dans les secteurs financiers, pharmaceutiques (contrôle des prix des médicaments), énergétiques (régulation hostile aux énergies fossiles) et technologiques (bien qu’il puisse y avoir ici un accord bipartisan pour lutter contre certaines dérives du secteur), et pour terminer la relance d’une extension de la couverture sociale. Alors que les démocrates ont conforté leur contrôle de la Chambre des représentants, le Sénat reste une institution essentielle dans le processus législatif américain, mais aussi dans la nomination des responsables des agences fédérales et des juges choisis par le président. Pour le moment (nous ne connaissons pas encore la composition du cabinet de Joe Biden), les résultats législatifs semblent surtout atténuer grandement l’influence de la gauche radicale du parti démocrate dans les choix de politique intérieure (alors que 50% des équipes qui ont rédigé le programme font partie de l’aile progressiste du parti), ce qui, à n’en pas douter, sera source d’une énorme déception de la part des partisans de Bernie Sanders et d’Elisabeth Warren, et qui ont voté Joe Biden par défaut sans grand enthousiasme. Pour faire passer au Congrès un plan de relance ambitieux de plus de deux mille milliards de dollars, la Maison-Blanche n’aura d’autre choix que d’entamer des négociations avec le camp républicain pour un accord bipartisan, ce qui éloignera du même coup du Sénat les projets étiquetés les plus à gauche (les républicains s’opposent à un programme de relance financé à terme par des hausses d’impôts et qui remettrait en cause la réforme fiscale de Donald Trump). 

La seule certitude aujourd’hui est que la nouvelle administration aura surtout la main sur la politique étrangère, ce qui permettra d’adoucir les relations internationales dont la sérénité est nécessaire à la bonne tenue des marchés financiers. La forte progression boursière observée dans les heures qui ont suivi les premiers résultats des élections américaines vient des secteurs qui avaient le plus à perdre d’une « vague bleue » et surtout progressiste au Congrès. Ceci illustre parfaitement les enjeux. Les plateformes technologiques, les valeurs pharmaceutiques et les compagnies d’assurance-santé ont fortement rebondi depuis le 3 novembre. Plus généralement, Wall Street a « salué » la perspective d’un blocage de toutes les réformes étiquetées à gauche ! On peut finalement voir l’élection présidentielle comme une espèce de match de catch à l’américaine entre Trump et Biden : le spectacle digne d’un vaudeville sidère les médias par ses rebondissements et le jeu des comédiens qui incarnent leur rôle avec conviction et talent, alors que l’essentiel des enjeux (financiers) n’est pas visible sur le ring, mais bien en dehors.

Conclusion

Dans notre note mensuelle précédente, nous avions opté pour une stratégie d’achat sur faiblesse. Nous pensons aujourd’hui que les planètes prennent une trajectoire qui rend leur alignement parfaitement plausible dans les prochains mois. Autrement dit, l’investisseur doit aujourd’hui se poser la question de savoir si son portefeuille est suffisamment exposé aux actions qui pourraient être les grandes gagnantes de 2021. 19 vaccins contre le Covid-19 sont actuellement en cours d’étude de phase 3. Les résultats préliminaires de Pfizer/BioNTech augurent une sortie de crise sanitaire qui certes ne sera définitive que lorsque les campagnes de vaccination seront déployées à grande échelle. Cependant, nous ne devons pas sous-estimer le choc de confiance qui nourrira à terme la reprise économique, la consommation des ménages, l’investissement des entreprises, et finalement les marchés boursiers.



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