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Examen réussi haut la main ! Dominique Marchese, Head of Equities & Fund Manager, 2021-11-05

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  • Nouveaux records boursiers : les craintes sur les marges semblent bien exagérées
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  • Conclusion

Nouveaux records boursiers : les craintes sur les marges semblent bien exagérées

Le trou d’air du mois de septembre semble déjà loin. Après la courte consolidation de quelques pourcents alimentée par une accumulation de sujets de préoccupation (reprise de la pandémie durant l’été avec le variant Delta, crise des promoteurs immobiliers en Chine, perturbations dans les chaînes logistiques et aggravation des pénuries, inflation des prix à la production et de la facture énergétique), les investisseurs attendaient les entreprises au tournant à l’occasion de la saison des publications des résultats du 3ème trimestre. Les inquiétudes quant à la solidité des marges bénéficiaires étaient légitimes compte tenu des formidables tensions dans les chaînes d’approvisionnement sur l’ensemble du globe et des fortes pressions sur les prix des produits intermédiaires. L’envolée des prix de l’énergie, plus particulièrement ceux du gaz, du charbon et de l’électricité n’aidait en rien à atténuer l’anxiété ambiante. La forte progression des prix à la production laissait planer un sérieux doute sur la capacité des entreprises à répercuter l’essentiel des coûts induits sur les prix finaux. Des sociétés aussi différentes que Nike, Honeywell, ABB ou même Amazon et Apple n’ont-elles pas souffert de ruptures d’approvisionnement qui ont impacté leurs revenus ou leurs marges, voire les deux à la fois ? Pourtant, les exemples de groupes industriels qui maitrisent efficacement leur chaîne logistique se sont aussi multipliés durant la saison des publications trimestrielles. Le fort dynamisme de la demande (vigueur de l’activité économique) a en réalité permis à de nombreuses entreprises de naviguer sans trop de dommages dans un environnement inflationniste qui semble là pour durer plus longtemps que prévu. Jusqu’à présent, les consensus bénéficiaires sont plutôt confortés par la saison des résultats et surtout par les prévisions confirmées ou réhaussées des entreprises. L’année 2022 s’annonce sous de bons auspices.

A noter que l’environnement des taux d’intérêt est resté particulièrement sage durant le mois écoulé. Aucune tension sur les taux obligataires n’est venue perturber les actifs risqués (taux souverain à 10 ans en dollar autour de 1,55-1,60%) ; les anticipations d’inflation ont cessé de se renforcer à la faveur d’une stabilisation des prix des hydrocarbures. A la fin de l’été, nombreux étaient les stratégistes des sociétés de gestion à attendre ou plutôt à espérer une correction de 10% des principaux indices boursiers avant la fin de l’année (scénario auquel nous n’adhérions pas, cf. lettre mensuelle d’octobre). Les résultats des entreprises, leur capacité à s’adapter et à générer des gains de productivité les ont pris par surprise, comme souvent dans les reprises économiques précédentes. Wall Street s’est même offert le luxe de nouveaux records historiques alors que les indices européens repartaient à l’assaut des plus hauts niveaux de l’année. Il ne s’agit en aucun cas d’une bulle déconnectée des fondamentaux économiques : au 29 octobre, 82% des 56% des entreprises de l’indice S&P 500 qui ont déjà publié leurs résultats trimestriels ont dépassé les attentes du consensus (croissance des résultats de 36,6% sur un an). Le total des profits cumulés a dépassé les attentes de 10,3% ! Profits records et taux d’intérêt au plancher restent les principaux moteurs de la hausse des marchés boursiers.

Quelques illustrations

Certains secteurs profitent évidemment plus que d’autres de la situation. Passons rapidement sur les groupes pétroliers qui génèrent sans surprise des excédents de trésorerie records. Les équipementiers de semi-conducteurs ont globalement dépassé les attentes du marché – ce qui n’était pas une sinécure, attendu le côté devenu plutôt consensuel du secteur chez les gérants d’actifs - et relevé leurs prévisions de revenus et de résultats. En effet, les fabricants de composants électroniques et les fondeurs (Samsung, TSMC, Intel) doivent impérativement augmenter leurs investissements pour répondre à la demande (digitalisation et électrification de l’économie, forte demande de l’industrie automobile). Malgré des chutes brutales de production de 20 à 30% sur le dernier trimestre (sans doute près de 10% de production mondiale perdue pour l’ensemble de l’exercice comptable en cours), les constructeurs automobiles touchés de plein fouet par la pénurie de semi-conducteurs ont fait davantage que de simplement rassurer les investisseurs. Les objectifs de marge et de free-cash-flow ont été dans l’ensemble confirmés pour l’année en cours, grâce au recentrage sur la vente des marques de voiture premium et des modèles les mieux margés (priorité aux véhicules électriques et à batterie rechargeable, les plus gourmands en électronique). Les constructeurs généralistes ont ainsi sciemment sacrifié le mass market,  mais ont annoncé dans la foulée de leurs résultats très solides une amélioration séquentielle dès le 4ème trimestre qui devrait ouvrir la voie à moins de perturbations en 2022 (cf. discours des directions de Daimler, Stellantis et Volkswagen).  Même le pneumaticien Michelin, pénalisé par l’effondrement des ventes de véhicules neufs de tourisme (volumes sur le marché de 1ère monte en baisse de 21% au 3ème trimestre), est parvenu à surprendre les investisseurs grâce à des revenus en hausse organique (à périmètre comparable et taux de change constants) de 8,4% (4% au-dessus du consensus). L’effet prix et le mix-produit combinés à un très dynamique marché du pneu de remplacement expliquent en grande partie cette remarquable performance qui a conforté les prévisions de la direction pour 2021, notamment en matière de résultat opérationnel et de free-cash-flow, ce qui illustre au passage l’excellent pricing power du groupe.  Autres illustrations dans des secteurs différents : Saint-Gobain (matériaux de construction) a annoncé un effet prix positif de 8,7% sur le seul 3ème trimestre (15% dans la zone Amériques !), ce qui contribuera à absorber l’inflation des coûts de production pour l’ensemble de l’exercice comptable, alors que Schneider Electric (équipements électriques et automatismes industriels) a battu les attentes des analystes avec une croissance organique de ses ventes de 8,8%. Sans les tensions dans la chaîne d’approvisionnement en composants électroniques, la croissance aurait atteint 10,8% (contre un consensus à +7,9%) !  La Chine représente 16% des ventes du groupe, mais le secteur résidentiel moins de 2,5%. Considéré par les Chinois comme une entreprise locale, très proche de ses clients, le leader mondial de la transition énergétique n’a pas souffert du ralentissement économique observé durant l’été. Le segment Energy Management est en croissance à deux chiffres et l’ensemble des activités chinoises en progression de 5% sur le dernier trimestre. Dans le secteur chimique, les revenus de Solvay ont dépassé de 7% les attentes (croissance organique de 24,7% sur un an, mais surtout de 6,2% par rapport au 3ème trimestre 2019). Ici aussi, à la forte progression des volumes (+17,6%) est venu s’ajouter un relèvement des prix de vente de 6,6% (+1,2% par rapport au trimestre précédent) qui a permis au résultat brut d’exploitation de dépasser le consensus de 5%, une nouvelle illustration des craintes exagérées du marché sur l’impact des coûts des matières premières sur la profitabilité. Nous pourrions continuer longtemps à décrire ces entreprises qui profitent du rebond économique sans trop souffrir des tensions inflationnistes vues par les industriels comme le revers de la médaille d’une reprise vigoureuse. Faudrait-il préférer une demande atone avec des tensions déflationnistes ? Les professionnels préfèrent de loin naviguer dans l’environnement actuel.

Nous terminons ici avec les services informatiques qui profitent d’une franche accélération des dépenses dans le cloud, la digitalisation et la cybersécurité, un secteur qui doit faire face à l’inflation des salaires des profils les plus recherchés dans les segments les plus dynamiques et à une chasse aux talents à laquelle se livrent sans faiblesse les différents acteurs – la rotation annuelle du personnel atteint près de 20% dans un cycle normal. Capgemini, leader européen, a publié des chiffres de croissance exceptionnels au 3ème trimestre (chiffre d’affaires en hausse organique de 13,2%) grâce à des gains de parts de marché permis par une politique volontariste de recrutement : 19 700  nouveaux collaborateurs engagés sur le seul 3ème trimestre (39 500 depuis le début de l’année), surtout des jeunes diplômés qui permettent de gérer efficacement la pyramide des âges et la question de l’inflation salariale. Le groupe a ainsi revu à la hausse ses objectifs financiers pour le reste de l’année, en particulier sa marge opérationnelle, ce qui témoigne d’une gestion efficace des pressions sur les coûts. 

CONCLUSION

A ce stade, nous ne pouvons que réitérer nos conclusions du mois précédent : la valorisation des principaux marchés sur la base des estimations du consensus pour 2022 nous permet de garder une vue favorable à l’égard des actions (rendement des free-cash-flows attendus en 2022 un peu inférieur à 5%, proche de la moyenne historique), même si la volatilité devrait être un peu plus soutenue compte tenu de la persistance de quelques sujets d’inquiétude. Nous envisageons toujours deux scénarios pour l’an prochain que nous rappelons brièvement (cf. lettre mensuelle d’octobre).

Le premier scénario est celui d’une bonne dynamique économique combinée à des pressions inflationnistes un peu plus fortes qu’escompté mais sans dérapage incontrôlé (plafonnement puis ralentissement des prix à la consommation que permet un meilleur équilibre offre/demande sur les marchés de l’énergie, progression des salaires inférieure aux gains de productivité). Dans ce scénario idéal pour la trajectoire des profits des entreprises (chiffres d’affaires en hausse et marges soutenues), les banques centrales normalisent très progressivement leur politique monétaire, la Réserve fédérale initiant son tapering avant la fin de l’année, mais sans contraction de leurs bilans, ni pressions fortes sur les taux longs. Ce scénario est évidemment favorable aux actions en général et plus particulièrement aux secteurs réputés value (financières, énergie, cycliques industrielles, matières premières…) moins pénalisés par la hausse des taux d’intérêt à long terme.

Le second scénario est moins exaltant pour la croissance économique : le consensus s’ajuste à la baisse car Pékin soutient trop mollement son économie, l’impulsion budgétaire américaine est insuffisante (Joe Biden est toujours à la peine pour faire adopter son programme de relance dont la taille est moins ambitieuse), l’impact des prix de l’énergie sur la demande est plus élevé que prévu, et pour finir les contraintes de production persistent dans les chaînes de valeur. Dans ce scénario qui n’est a priori pas favorable aux actifs risqués, nous pensons que les autorités monétaires seraient alors amenées à freiner le rythme de normalisation de leur politique monétaire, ce qui garantirait des taux d’intérêt réels négatifs, ou du moins très inférieurs à la croissance, pour une plus longue période. Les investisseurs se trouveraient une fois encore face à l’absence d’alternative sérieuse et se verraient contraints d’accorder une place importante aux actions, avec un biais sans doute plus favorable à la thématique croissance et aux valeurs défensives (valeurs technologiques, sociétés pharmaceutiques, services aux collectivités…).

Il est toujours un peu tôt pour privilégier un scénario au détriment d’un autre ; beaucoup dépendra des décisions politiques prises à Pékin et à Washington dans les prochaines semaines. L’investisseur veillera ainsi à maintenir une bonne diversification géographique et sectorielle dans son portefeuille en évitant les paris trop appuyés. Les positions longues en volatilité (couvertures via des options de vente sur indices) seront maintenues.  


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